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Pertinences citoyennes
Une épopée d’humiliations pour une « identité nationale »
Les conflits armés ayant sévi en RD-Congo de 1996 à 2013 ont favorisé l’émergence d’une identification collective là où des idéaux et des idéologies politiques tels que la zaïrianisation ou le recours à l’authenticité n’avaient pas reçu une adhésion sociale sur l’identité nationale. Nourrie par les représentations nationalistes développées dès la fin des années 1960, cette identité semble engluée dans une colère expansive s’exprimant politiquement par des lynchages.
L’exercice du pouvoir, dans ses formes sociales de domination, de responsabilité déléguée ou autoproclamée, d’aura spirituel et de parrainage, et l’acte de lynchage des personnes incarnant ces différentes formes de pouvoir sont à la fois proches et éloignés, de par la théâtralité de leur discours, de leurs gestes, de leur jeu, en somme de par leur langage dans un cadre symboliquement contenu, pour le pouvoir, ou débordé, pour le lynchage.
L’unité du pouvoir et du lynchage
« Vous n’êtes pas au pouvoir, vous tabassez les gens qui ne partagent pas les mêmes opinions que vous, alors le jour où vous serez au pouvoir, vous ferez quoi de ceux qui ne parlent pas comme vous, vous les tuerez. »
Antoine Boyamba, ministre des Congolais de l’étranger, Journal Afrique, TV5, sangoyacongoactu, Youtube, 2017.
En posant le sentiment d’humiliation ainsi que l’amertume et la frustration qui l’accompagnent comme instigateurs de l’identité nationale d’après guerres et le lynchage des personnes incarnant les pouvoirs comme expression d’appartenance à la communauté, je me suis interrogé sur la confrontation des langages: celui du pouvoir si calculé et sophistiqué et celui du lynchage, éperdu et rudimentaire. Malgré son histoire de guerres et de pillages de ressources, le pays semble ne devoir se battre que contre lui-même. Les unités militaires ou policières affectées à la protection des hautes personnalités en sont une illustration: de par la qualité de leur formation et leur dotation souvent largement supérieures depuis la création du système de défense congolais. A l’époque coloniale déjà, il était clair que la principale mission de la Force publique était de contenir la population et de la soumettre au projet colonial. Les institutions étatiques sont ainsi essentiellement perçues comme des cadres d’exercice du pouvoir, des cadres de contrôle, des cadres contraignants et le pays se dissipe pour devenir une réalité lointaine. La nature de ces cadres est tel qu’il n’y a plus de cadre, et le pouvoir se démultiplie, se disperse.
Mon travail se situe dans cet espace de non-cadre où se confrontent le langage du pouvoir et celui du lynchage, en questionnant l’évolution de notre société à travers la nature de ces deux langages. La réaction du ministre des Congolais de l’étranger (cité plus haut) face au phénomène des « combattants », des jeunes de la diaspora s’exprimant par le lynchage, met en évidence que ces deux langages ne se comprennent pas l’un l’autre. En effet, le ministre parle de ces jeunes comme de personnes dont la finalité serait d’atteindre l’espace du pouvoir dans le but de l’exercer à leur tour, et non de simplement le profaner par le lynchage ou de renvoyer l’opprobre, l’humiliation et la condamnation à la face de ceux qui exercent le pouvoir.
J’ai mis en présence des éléments de ces langages, d’une part des objets de pouvoir, élaborés, calculés, sophistiqués et, d’autre part, des objets de lynchage, rudimentaires, spontanés, primaires, pour ébaucher une description de l’expression du politique dans ce contexte si précaire, mais également pour les réunir dans leur condition commune, car lyncher c’est bien aussi l’affirmation d’un certain pouvoir.
— Sinzo Aanza