Vue d’exposition
Photo © Tadzio
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Maarten Vanden Eynde & Musasa
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Sammy Baloji, Jean Katambayi Mukendi, Daddy Tshikaya
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Sammy Baloji
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Maarten Vanden Eynde & Musasa
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Jean Katambayi Mukendi
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Sammy Baloji
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Maarten Van den Eynde
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Sammy Baloji, Jean Katambayi Mukendi, Daddy Tshikaya
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Jean Katambayi Mukendi
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Jean Katambayi Mukendi
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Le projet On-Trade-Off
Le projet collectif On-Trade-Off est conçu comme une plateforme de savoir transdisciplinaire. Chaque participant aborde ce projet selon ses propres outils et médias de prédilection. L’aboutissement est une source collaborative qui vise à promouvoir une méthode plus durable et solidaire de production artistique. En vue de développer cette vision holistique, On-Trade-Off encourage la participation d’acteurs issus de champs divers (réalisateurs, artistes, penseurs, activistes, Organisations Non-Gouvernementales, communautés locales, etc.). On-Trade-Off réunit donc Sammy Baloji, Jean-Pierre Bekolo, Alexis Destoop, Marjolijn Dijkman, Gulda El Magambo, Femke Herregraven, Jean Katambayi Mukendi, Frank Mukunday & Trésor Tshibangu, Rosa Spaliviero, Georges Senga, Daddy Tshikaya, Maarten Vanden Eynde et Musasa
Au cours des prochaines années, On-Trade-Off se développera pour être présenté sous divers formats et dans des contextes variés.La première de ses présentations a eu lieu entre le 10 et le 12 janvier 2019 dans le cadre de la 9ème Contour Biennale à Mechelen, Belgique, dont le commissariat était assuré par Nataša Petrešin-Bachelez. Les deux prochains épisodes du projet seront également exposés à la Contour Biennale en mai, puis en octobre 2019. Avant cela, la galerie Imane Farès est heureuse d’accueillir l’exposition On-Trade-Off: Green Gold, second volet du projet. Une conversation avec plusieurs membres de la plateforme On-Trade-Off aura lieu le samedi 30 mars à la Colonie, de 15h à 18h.
L’exposition On-Trade-Off: Green Gold
L’exposition On-Trade-Off: Green Gold réunit les œuvres de six artistes de ce collectif : Sammy Baloji, Jean Katambayi Mukendi, Georges Senga, Daddy Tshikaya, Maarten Vanden Eynde et Musasa. Elle s’articule autour de l’extraction des ressources minières de la République Démocratique du Congo (RDC), révélant l’envers problématique de ce système industriel.
Le titre ironique de cette manifestation fait référence à plusieurs œuvres exposées qui prennent pour point de départ le système de production du lithium – troisième élément chimique du tableau périodique des éléments. Surnommé « green gold » (or vert en anglais), le lithium est à la fois une ressource fondamentale pour la transition écologique, mais aussi un élément au cœur d’un circuit industriel et économique virulent. Permettant la production en masse de batteries lithium-ion utilisées pour les smartphones ou les voitures, il devient une commodité, une devise. Le « nouvel or noir » se mue alors en monnaie, devenant de fait, un « or vert ».
Extraction, évaporation, purification, calcination. Emblématiques de l’anthropocène1 de par leurs effets dévastateurs sur la planète, ces procédés complexes sont dévoilés dans les œuvres exposées.Au travers de médiums aussi variés que la peinture, la sculpture, la photographie ou le dessin technique, les six artistes décortiquent les multiples étapes de la production du lithium et du cuivre et en retracent l’origine qui prend naissance en RDC. Oscillant entre esthétiques scientifiques, documentaires, voire caricaturaux, les œuvres sont ici réunies selon une logique organique.
Les peintures de la série Material Matters (Li3, Co27, Cu29) (2018-2019) de Maarten Vanden Eynde (1977, Belgique) et Musasa (RDC) rappellent les anciens tableaux scolaires utilisés au début du siècle dernier. Saturés de pictogrammes et de symboles, ces tableaux empruntent les mécanismes du rébus, résumant ainsi avec immédiateté le cheminement, long et complexe, que subissent ces éléments. Matériau brut, le lithium est aussi la ressource première pour la production d’énergies dites durables : il est donc au centre de flux économiques, géographiques, mais aussi énergétiques. Les six artistes s’approprient le conducteur de ces flux – en l’occurrence le câble de cuivre – pour produire l’œuvre collective Tesla Crash, pièce maîtresse de l’exposition. Souvent dissimulé, le câble est ici visible. Il est l’élément constituant de cette voiture miniature, suspendue dans l’espace.
Le tissage du fil de cuivre souligne la dimension physique des circuits de production. Pensée par Sammy Baloji (1978, RDC), Jean Katambayi Mukendi (1974, RDC) et Daddy Tshikaya (1986, RDC), Tesla Crash est entièrement constituée de cuivre recyclé. Ce simple détournement transforme cette voiture, habituellement alimentée par des batteries lithium-ion, en simulacre ironique de la célèbre Tesla Model X. Version améliorée de cette dernière, Tesla Crash questionne une actualité sociale et écologique périlleuse. Cette technique de tissage, typiquement congolaise, se retrouve également dans l’œuvre Sphère (2016) de Jean Katambayi Mukendi. Des fils de cuivre s’enchevêtrent ici pour matérialiser les Afrolampes (2016), objets singuliers que Katambayi Mukendi a représenté selon des tracés précis au bic et au marqueur. Dans ces dessins techniques, un graphisme futuriste vient pondérer l’aspect scientifique pour rappeler, avec humour, que le quotidien dans le Sud global est souvent rythmé par les coupures d’électricité.
On-Trade-Off: Green Gold se développe effectivement selon un lien concret avec la réalité sociale de la RDC – et plus généralement de la planète. Terre « mère » du lithium, du cuivre et du cobalt, la RDC est un pays ambigu où la richesse naturelle se confronte à une misère sociale. En témoignent les images de Georges Senga (1983, RDC), habitées non pas par des Tesla Model X, mais par des carcasses d’anciens vans Volkswagen – multinationale ayant passé des accords avec la Chine pour pouvoir extraire du lithium en RDC.
La photographie Zhong Hang Mining (2011) de Sammy Baloji rejoint le travail de Senga enmontrant le portail d’une entreprise chinoise à Kolwezi, ville convoitée par les multinationales d’exploitation minière. De fait, ces circuits industriels sont étroitement liés à une chaîne économique de production, dont la violence est globale comme en témoigne la série photographique Kolwezi de Baloji. Exploitation humaine d’une main-d’œuvre délocalisée, ignorance des consommateurs, et décalage entre les frais de production et les prix sur le marché… sont autant de vagues réminiscences du commerce triangulaire du XVIème siècle. Émanant d’une prise de conscience face à ce cycle violent, un portrait de creuseur (Portrait #17 : Cité de Kawama, de la série Kolwezi) dévoile aussi un « capitalocène »2 à l’œuvre.
Cette vision macroscopique du circuit d’extraction des ressources minièress’oppose à l’approche adoptée par Vanden Eynde dans son œuvre, Technofossils (2015). La malachite (amas de carbonate hydraté de cuivre) ici sculptée laisse apparaître le contour d’un Samsung E570, fossile à-venir de l’anthropocène. La matière (cuivre, cobalt ou lithium) révèle la finalité de sa propre transformation en commodité, nous ramenant ainsi à un « niveau moléculaire de la réalité » selon l’expression de Nicolas Bourriaud.
Véritable réflexion sur les luttes politiques molaires (de masses), On-Trade-Off: Green Gold ne délaisse pourtant pas les luttes moléculaires (Félix Guattari, La révolution moléculaire) qui saturent notre réalité globale. Fragment du projet ambitieux qu’est On-Trade-Off, cette exposition donne un aperçu de la dimension évolutive et collaborative de cette plateforme.
— Line Ajan, Février 2019
Gestion générale de projets: Katrien Reist et Julia Reist
Équipe du projet Picha: Rosa Spaliviero, Sammy Baloji et Gabriele Salmi
Équipe du projet Enough Room for Space: Maarten Vanden Eynde et Marjolijn Dijkman
Film Curator: Rosa Spaliviero
1. L’anthropocène est un terme qui désigne l’ère géologique actuelle, caractérisée par une accentuation des effets des activités humaines sur la terre. En ce sens, les hommes deviennent des agents géologiques.
2. « Capitalocène » est un néologisme forgé par Andreas Malm, géographe et auteur de L’anthropocène contre l’histoire (2017)